Protocole de l’Observatoire Zététique : un détail dans l’expérience de radiesthésie

Quand le radiesthésiste se rend aux toilettes

Lors de récents échanges sur la mail-liste « psiliste », un membre de l’Observatoire Zététique a précisé un détail intéressant concernant le dernier protocole de l’Observatoire Zététique (dont nous avons déjà discuté ici) : durant l’une des séries, le radiesthésiste s’est rendu aux toilettes. Malgré la possibilité potentielle de tricher en se rendant ainsi dans un lieu non contrôlé par les expérimentateurs, ce membre de l’Observatoire Zététique indique que les expérimentateurs se sont réunis afin de valider la série malgré tout.

C’est là une grave entorse au protocole dans la mesure où dans un protocole scientifique, toute possibilité potentielle de triche doit être exclue. Cependant, il est possible, pour les expérimentateurs, selon des paramètres imprévus dans l’expérience, de s’adapter en conséquence pour que l’expérience puisse se dérouler. Ainsi, si les membres de l’OZ peuvent avoir jugé que selon eux, la triche n’était pas possible, même si le magnétiseur s’était rendu aux toilettes, il était possible de préciser cela dans le protocole expérimental.

Quand l’Observatoire Zététique ne publie pas l’ensemble des paramètres

Mais ce détail n’est pas mentionné dans le protocole de l’Observatoire Zététique : il n’est mentionné nulle part :

→ Que le magnétiseur a été autorisé à se rendre aux toilettes,

→ Que les expérimentateurs ont échangé autour de cet incident et se sont réunis pour valider la série.

Ainsi, si l’on peut parfois accepter dans une publication que l’auteur explique une difficulté ou un paramètre sujet à discussion, il est inadmissible qu’un paramètre de ce type ayant engendré un tel choix ne soit pas mentionné dans le protocole. C’est une grave erreur sur le plan scientifique. Comme le souligne l’un des intervenants sur psiliste, on peut s’interroger qu’Henri Broch, professeur de physique et enseignant en zététique à l’université, indique à propos de ce protocole :

« Très bel exemple de comment il faut procéder, dans la convivialité la plus complète (mais avec une méthode rigoureuse) »

Le membre de l’Observatoire Zététique précise cependant à ce sujet qu’Henri Broch ne connaissait alors pas ce détail.

Quand l’Observatoire Zététique sait avoir fait une erreur

Mais le plus étonnant n’est pas là. Le membre de l’Observatoire Zététique précise ensuite que les membres de l’Observatoire Zététique ont discuté ensuite de la nécessité de mentionner l’incident dans le rapport. La majorité de l’Observatoire Zététique soutient alors qu’il aurait fallu l’indiquer, et même Henri Broch indique lui aussi qu’il aurait fallu le faire dans un échange ultérieur, ce qu’accepte également le membre de l’Observatoire Zététique en question. Mais malgré cela

L’Observatoire Zététique n’a pas publié de rectificatif.

Henri Broch n’a pas jugé bon de revoir son commentaire initial sachant pourtant à présent que la méthode n’était pas rigoureuse : un biais n’a pas été contrôlé et ce biais n’a pas été mentionné dans le compte-rendu.

Quand l’Observatoire Zététique dit aux autres de ne pas faire ce qu’ils font

Enfin, on remarquera qu’un membre de l’Observatoire Zététique, Florent Tournus, a publié sur le blog de l’OZ une critique d’une expérience de Sheldrake, en avril 2007, c’est à dire après la première publication du protocole de l’OZ sur ce même blog :

« Lastly, the authors themselves admit that cheating was possible (for instance using electronic devices). Although the authors are “confident” on this point and claim that “it is not plausible”, cheating can not be totally ruled out. For the sake of scientific rigor, an experiment where any form of “normal” communication is really made impossible would have been preferable, otherwise any sound conclusion can unfortunately not be drawn from the results… »

Aucune conclusion ne peut être tirée des résultats, dans un sens comme dans l’autre : certains membres de l’Observatoire Zététique critique donc chez Sheldrake une erreur que d’autres membres ont eux-même commis (Florent Tournus nous a précisé qu’il n’avait pas connaissance de ce détail de l’expérience de l’OZ lors de la rédaction de son article). Si Sheldrake a eu l’honnêteté d’expliquer son choix et de le mentionner dans son protocole, l’Observatoire Zététique a préféré cacher ce détail en ne le mentionnant pas, même en sachant qu’ils devaient le faire.

Quand il faut essayer de comprendre tout cela

Nous avions déjà analysé en détail ce protocole et montré les différents problèmes qu’il comportait. Ce détail est encore plus problématique que ceux que nous avions déjà souligné. Comment comprendre que les membres de l’Observatoire Zététique ne l’aient pas mentionné ?

Il y a de nombreux docteurs parmi les membres de l’OZ : il n’est pas raisonnable de penser que les membres de l’OZ ne savaient pas qu’il faisait une erreur : ils savaient très bien qu’ils devaient publier ce détail. Alors pourquoi ne pas l’avoir fait ?

Ce n’est pas la première fois que nous trouvons dans des protocoles sceptiques de telles approximations. Nous pensons qu’elles ne sont pas dues au hasard, mais nous n’irions pas jusqu’à dire quelles sont voulues consciemment (car au fond, nous ne savons rien de ce qui s’est passé dans la tête des membres de l’Observatoire Zététique). Nous pouvons simplement raisonner à partir des faits dont nous disposons en proposant l’hypothèse suivante : ce type d’imprécision dans le protocole permet la mise en place d’une stratégie auto-immune quel que soit le résultat qui sera obtenu. Supposons en effet que le protocole ait été un succès, que le magnétiseur ait effectivement obtenu des résultats significatifs, les membres de l’Observatoire Zététique auraient-ils « oublié » de mentionner ce détail ? Nous n’en savons rien en revanche, nous savons qu’il leur aurait été possible de le faire et de dire :

→ Nous avons commis une erreur,

→ Cette erreur invalide le résultat obtenu,

→ Les résultats ne peuvent être pris en compte ; Il serait nécessaire de refaire cette expérience.

Le fait même qu’il y ait cette possibilité invalide l’ensemble du protocole et interroge une nouvelle fois la démarche de l’Observatoire Zététique : car dans tous les cas, du fait même de cette imprécision, l’Observatoire Zététique, pouvait, quel que soit le résultat, ne pas conclure à un effet psi, car il y avait deux possibilités :

→ Le magnétiseur n’obtient pas de résultat : dans ce cas, le détail concernant les toilettes n’est pas mentionné (car bien entendu, si cela se savait, cela invalidait l’ensemble du protocole pour les raisons que nous décrivons),

→ Le magnétiseur obtient un résultat : possibilité d’invoquer le biais potentiel afin de ne pas conclure au vu des résultats.

Dans le deuxième cas, il ne restait qu’à l’Observatoire Zététique de laisser un commentaire du type « malgré les résultats statistiquement significatifs obtenus par le magnétiseur, nous avons malheureusement laissé un biais potentiel en laissant le magnétiseur se rendre aux toilettes. En conséquence, et même si cela nous déçoit beaucoup, nous ne pouvons conclure quant aux résultats obtenus et des tests plus rigoureux s’avèrent nécessaire ».

Il s’agit selon nous d’une nouvelle illustration des incohérences de l’approche de l’Observatoire Zététique dont les sources sont peut-être à trouver dans le paradoxe même de leur fondation : investiguer des phénomènes que la plupart de ses membres pensent impossibles de façon certaine. Dans ces conditions, obtenir réellement un résultat significatif mettrait ses membres face à une sérieuse dissonance cognitive. Ceci explique peut-être la mise en place de ce type de stratégie, qu’elle soit volontaire ou non.

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